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COP21 : un bilan en demi-teinte

Après d'âpres négociations jusqu'à la fin, la COP21 a accouché d'un accord d'ores et déjà qualifié d'historique. Mais quelles sont les avancées apportées par l'accord de Paris ? Et quelles sont les lacunes de cet accord ? Nous vous proposons de dresser le bilan de cette conférence climatique, à l'issue de laquelle tout reste à faire.

Sommaire


Temps de lecture moyen : 4'41
Copyright : Ron Mader on Flickr

Des résultats en demi-teinte

A l'issue de deux semaines d'intenses négociations internationales, le bilan de la COP21 est en demi-teinte ce que résume bien une formule du Guardian : "En comparaison de que cela aurait pu être, cet accord est un miracle. En comparaison de ce qu'il aurait dû être, c'est un désastre".

 


Bien sûr, on ne peut que reconnaître les avancées obtenues. Contrairement à Copenhague, un accord universel et contraignant, qui reconnaît la nécessité d'agir contre le réchauffement climatique, a été adopté.

 


Fait inespéré, le texte mentionne même un seuil d'augmentation des températures à 1,5°C qu'il faudrait essayer de pas dépasser.

 


Pour y parvenir, le texte prévoit que toutes les parties, dès 2020, devront se retrouver tous les cinq ans et qu'ils auront l'obligation de renforcer leurs ambitions en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (les fameuses contributions nationales ou INDC dans le jargon de la COP21). Ces rendez-vous réguliers devraient permettre d'exercer une pression diplomatique et publique sur les Etats qui ne font pas les efforts requis.

 


Mais c'est là que le bât blesse : a-t-on vraiment le temps d'attendre jusqu'en 2020 pour renforcer nos efforts de lutte contre le réchauffement climatique ? Et comment s'assurer que chaque pays tiendra ses promesses ?

 


Selon les ONG environnementales, l'Accord de Paris nous laisse sur une trajectoire d'augmentation globale de 3°C au mieux et ne remédie d'aucune manière aux désastres climatiques subis par un nombre croissant de populations vulnérables dans le monde.

 

Des avancées indéniables

La COP21 est une réussite dans la mesure où c'est la première fois que tous les pays de la planète (et pas seulement les pays riches) reconnaissent l'urgence d'agir contre le réchauffement climatique, et tombent d'accord pour faire un effort qui les engagent. Les promesses formulées par un Etat l'engage en effet bien davantage qu'un objectif imposé par une instance extérieure.

 


L'objectif fixé dans l'Accord de Paris est de maintenir la montée des températures "bien en deçà de 2°C". Le texte mentionne même un objectif idéal de 1,5°C. Cet objectif semble bien difficile à atteindre, au regard de la trajectoire réelle suivie par les pays jusqu'ici (c'est-à-dire une augmentation de la température d'environ 3°C). Mais le fait de l'inscrire noir sur blanc dans un accord international est une étape importante car la société civile est désormais en droit d'exiger de ses chefs d'Etat une obligation de résultats.

 


L'accord fixe aussi comme objectif à atteindre après 2050 la "neutralité carbone" : cela consisterait à compenser toutes les émissions de gaz à effet de serre dans le monde par des "puits de carbone" comme les forêts. Une autre solution serait d'obliger les industries à capter et à stocker le carbone qu'elles émettent, mais les ONG environnementales y sont opposées car c'est une solution possiblement illusoire.

 


Enfin, le traité final de la COP21 a prévu une "clause de révision". A partir de 2025, chaque pays sera tenu de faire part, tous les cinq ans, de ses engagements en matière de réduction de gaz à effet de serre et de les maintenir au niveau précédent ou de les augmenter. C'est la première fois que tous les pays du monde acceptent le principe de faire des efforts régulièrement revus à la hausse.

 

Encore beaucoup d'efforts à faire

Avec l'accord de Paris, les gouvernements ont posé les bases d'une action ambitieuse de lutte contre le changement climatique. Pourtant, il reste beaucoup à faire et l'accord trouvé à l'issue de la COP21 n'y suffira pas.

 


En effet, ce traité est "juridiquement contraignant" en théorie seulement... Dans les faits, il sera difficile de vérifier que les engagements de chaque pays sont bel et bien tenus. Seuls les lois et les décrets que les Etats décideront eux-mêmes de s'imposer (y compris collectivement, dans le cas de l'Union européenne) feront office de contrainte.

 


Il n'existe pas encore d'organisme pour vérifier de manière indépendante que chaque pays mesure correctement ses propres émissions et qu'il ne les enjolive pas pour paraître plus vertueux qu'il n'est.

 


La question cruciale du financement reste un autre problème : dans les pays du Sud les projets de développement "verts" (orientés vers les énergies propres et le respect des écosystèmes) ont besoin d'être financés. Ce financement est assuré jusqu'en 2025, grâce au Fonds vert de l'ONU (100 milliards d'euros par an) alimenté par les pays développés. Mais rien n'est officiellement prévu pour après 2025. Les infrastructures d'adaptation (digues pour protéger les villes des inondations, bâtiments résistants aux ouragans…) n'ont pas trouvé non plus de financements.

 


Enfin, le monde est-il prêt à renoncer aux énergies fossiles ? Selon une étude parue dans la très sérieuse revue "Nature", si le monde veut respecter le seuil de 2°C de réchauffement, il doit laisser 80% de ce qui reste d'énergies fossiles dans le sol. Les énergies renouvelables sont une alternative possible, mais le mot ne figure même pas dans le traité de la COP21. 

 


Une autre idée a aussi été abandonnée au cours de la Conférence de Paris : celle de donner un prix au carbone par le biais d'une taxe ou d'un marché d'échange des émissions de CO2. Ce point, comme beaucoup d'autres, reste à discuter dans les rendez-vous à venir... La date de 2018 a d'ores et déjà été choisie pour faire revenir les Etats à la table des négociations.

 

Auteur :   |   Date de création :   |    Dernière mise à jour : 14/12/2015